Des visages derrière la recherche avec Xavier Nicolay

Odoo • Image et Texte

Ce mois-ci, nous vous proposons de découvrir l'interview de Xavier Nicolay, dans notre rubrique "Un visage derrière la recherche".

Cet ingénieur de Recherche au sein de Meurice R&D et de l’Institut de Recherche LABIRIS a participé à la JdCHE 2023 où il a présenté son projet SUBLIMUS.

Pouvez-vous résumer votre parcours de recherche ?

"Après un parcours universitaire d’Ingénieur Chimiste et des Industries Agricoles au sein de l’Institut Meurice- ULB, je n’ai jamais vraiment quitté l’Unité de Biotechnologie de l’Institut Meurice (aujourd’hui : UR Bioprocédés de Labiris) où j’ai réalisé mon TFE en 1996. Il s’agissait alors d’optimiser la fermentation du jus de pomme en cidre en co-immobilisant les microorganismes impliqués. L’encapsulation de bactéries est restée un leitmotiv jusque dans mes derniers projets. Une année de travail de thèse sur un sujet fondamental a définitivement révélé mon affinité pour la recherche appliquée. Et depuis 1999, je me consacre exclusivement à des projets de biotechnologie environnementale. D’abord pour l’épuration des effluents gazeux industriels par biofiltration et, depuis 2008, pour la valorisation de métaux dans des ressources secondaires (mines urbaines, déchets industriels) par biométallurgie".

Quels sont vos domaines d’expertises ?

"L’utilisation de bactéries des milieux extrêmes a ouvert la voie de la biométallurgie pour la valorisation des minerais d’abord et pour des déchets industriels et domestiques ensuite. D’ailleurs, des initiatives fleurissent partout dans le monde pour la biométallurgie de ces déchets à échelle industrielle et avec des méthodes plus respectueuses de l’environnement que la pyrométallurgie (fonderie). Nos travaux actuels au sein de Labiris et Meurice R&D ambitionnent d’offrir des solutions alternatives écologiques et économiquement viables à l’industrie lourde pour le recyclage de nos pc, gsm, tablettes…

Ces dernières années, j’ai également investigué la récupération de métaux dissous dans des résidus domestiques par biosorption sur la levure résiduelle de la brasserie, une matière ultra-disponible en Belgique, locale,  qui donne de très bons rendements et s’inscrit parfaitement dans l’esprit de l’économie circulaire !"

Le projet de recherche dont vous êtes le plus fier ?

"Les deux derniers projets accomplis (2019-2022) et les plus aboutis :

-         Bridge SUBLIMUS Innoviris (Meurice R&D, ULB, VUB) pour la quantification des métaux, en particulier des métaux précieux dans les eaux usées de Bruxelles et le développement d’une technologie pour leur récupération. La levure, résidu de la fermentation en brasserie, s’est avérée la solution la plus efficace d’un point de vue technico-économique et elle permettrait de capter 4 des 6 kg d’or annuels dans la station d’épuration Aquiris de BXL selon les rendements actuels.

-        Precious Innoviris : le projet offre une alternative biologique à la fonderie pour les circuits imprimés des Déchets d’équipements électriques et électroniques. Selon les extrapolations du projet, une capacité de bioréacteurs de 30m³ permettrait de valoriser 100% du cuivre et près de 90% de l’or contenu (100g/tonne) dans les 275 tonnes de circuits imprimés collectés annuellement en Belgique par Recupel. La technologie aura peut-être du mal à s’imposer en Europe où des filières pyrométallurgiques sont bien implantées mais elle pourrait offrir des solutions pour les mines urbaines de mégapoles dans des pays qui n’adhèrent pas à la convention de Bâle et qui exportent leurs déchets vers l’Inde, la Chine, la Malaisie..."

La recherche appliquée expliquée en une phrase ?

"La recherche appliquée, en pratique, c'est d'abord une bonne dose de créativité pour générer de l'innovation (la veille scientifique/technologique est une source importante d’inspiration !), suivie de plusieurs mois/années d'opiniâtreté en laboratoire pour arriver à un résultat mais, de manière plus générale,  c'est surtout le moteur de l'évolution technologique qui soutient la compétitivité de notre économie".

Avez-vous une anecdote avec SynHERA que vous souhaiteriez partager ?

"C’est le plus grand écart de température vécu pour moi : lors de la mission WBI qui a combiné Rio de Janeiro et le Québec en moins de deux semaines avec Cédric Bister, conseiller scientifique chez SynHERA… Une très belle expérience culturelle, scientifique et humaine qui a abouti indirectement au projet Precious et qui a ouvert des opportunités pour la biométallurgie des ressources secondaires au Brésil". 

Qu’est-ce qui vous donne du baume au cœur dans votre travail ? 

"Ce qui m’émeut au quotidien, c’est le côté extraordinaire du monde microbiologique en général et des bactéries extrêmophiles acidophiles en particulier : les Acidithiobacilli qu’on utilise sont extraits de milieux hostiles comme les exhaures de mines ou les geysers acides des eaux sulfureuses comme on en trouve au Yellowstone…ces bactéries et archées se développent dans des conditions aux limites du vivant avec des besoins très simples.

Ce qui m’anime : c’est la conversion d’une recherche, d’un procédé original et nouveau développé dans un projet en une réalisation pilote ou même à échelle industrielle".

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